Le point sur les cheminées au bio-éthanol

Devant le débat que soulève, en France, l’utilisation des cheminées au bio-éthanol, la rédaction de Votre-Habitat a souhaité en savoir plus. Le bureau du SAFALC, composé de messieurs Marc Gésiot (Président) , Stéphane Delbassé (Vice-Président), Ardavan Tabatabaï (Trésorier) et Jean-Louis Lubrano (Secrétaire), a accepté de répondre à nos questions.

Le SAFALC, syndicat regroupant lesprofessionnels fabricants, importateurs, distributeurs des appareils fonctionnant à l’alcool, a pour objet de défendre les intérêts de tous les professionnels de ce marché.

Il a pour vocation à :

  • Promouvoir le concept des appareils fonctionnant à l’alcool ;
  • Rassurer le consommateur quant à la diffusion et à l’exploitation de ces appareils;
  • Répondre aux différentes informations données au consommateur, en repositionnant le débat dans un contexte rationnel ;
  • Etudier les évolutions législatives ou réglementaires concernant le commerce de ces appareils et s’impliquer dans les démarches définissant les normes et veiller à leur cohérence par rapport à ces produits ;
  • Etre un interlocuteur auprès des pouvoirs publics, des organismes sociaux, des associations, syndicats et corporations ;
  • Assurer la défense des intérêts des personnes morales et de leurs représentants professionnels, exerçant d’une façon habituelle une activité de fabrication et/ou de commercialisation de ces appareils fonctionnant à l’alcool ;
  • Exercer tous les droits, recours et actions dans le cadre de la défense de l’intérêt collectif des professions qu’il représente.

Ce syndicat aura également pour mission :

  • D’informer les adhérents sur les évolutions réglementaires de ces appareils ;
  • D’aider ses adhérents à promouvoir et à développer une politique de qualité et de sécurité ;
  • De mettre en œuvre tous les moyens et créer tous les services propres à assurer la liaison entre les différents adhérents représentés ;
  • Edicter toutes les règles déontologiques et éthiques de manière à faciliter aux adhérents le développement de leurs activités.
Le syndicat a publié récemment un communiqué sur « le scandale des cheminées à l’éthanol ». Pouvez-vous nous expliquer votre position ?

Le SAFALC déplore la campagne de diabolisation qui a été menée par la Commission de Sécurité des Consommateurs et UFC Que Choisir, car les informations diffusées l’ont été sans retenue, sans distinction, ni discernement et a jeté l’anathème sur l’ensemble des professionnels impliqués sur ce marché. Cette campagne de déstabilisation a mis en péril de nombreuses entreprises.

Le SAFALC déplore que:

  • les efforts des professionnels de l’éthanol ne soient pas suffisamment reconnus par les pouvoirs publics, la plupart des fabricants ayant mis en place des mesures préventives à l’utilisation de ces produits, particulièrement en améliorant la formation des revendeurs et l’information donnée au consommateur ;
  • les travaux menés depuis plus d’une année dans la cadre de la commission AFNOR soit déjugée si fortement par cette communication à charge ;
  • la communication faite par la CSC ait contribué à une profonde modification du projet de norme qui était pratiquement aboutie à fin 2008.
Selon vous pourquoi une telle mise en garde a été faite sur ces cheminées ?

Cette mise en garde a sans doute pour origine une diffusion trop large et dans des circuits de distribution insuffisamment informés et formés (comme la grande distribution ou internet).
De plus, le succès de la commercialisation de ces produits a vraisemblablement attiré des convoitises et amené d’autres acteurs à réfléchir pour récupérer tout ou partie de ce marché en croissance, surtout dans un contexte économique général en baisse.

2. Le débat en Europe

Est-ce que ce débat est propre à la France ?

Les médias étrangers font un peu écho de cette agitation française, mais le débat n’existe pas vraiment dans les autres pays.
Les autorités des autres pays européens commencent à se pencher sur ce dossier, parce qu’ils comprennent que cela peut avoir une incidence avec l’application d’une norme à terme qui pourrait devenir européenne.

Il est à noter que la France a été le premier pays à engager une réflexion sur une norme, et il est dommage d’aboutir à un résultat qui ne peut obtenir le consensus. Les autres pays européens deviennent sceptiques devant ce projet de norme française qui ne paraît pas forcément cohérente avec le produit. Ainsi, le HKI allemand a engagé une réflexion sur un projet de norme avec des constructeurs allemands afin de ne pas se faire imposer une norme dont ils n’approuveraient pas tous les principes.

Sinon, les réglementations à l’étranger sont souvent assorties de restrictions d’usage très précises et de recommandations à l’attention des consommateurs pour les responsabiliser.
De plus, ces réglementations reposent sur des principes de pragmatisme et de cohérence par rapport à l’accidentologie rencontrée avec les appareils étudiés et veulent traiter les dangers pour ce qu’ils représentent.

Cas des Etats-Unis et du Canada

Les autorités américaines ont établi des certifications par Underwriters Laboratoires Inc. applicables aux Etats-Unis et au Canada, basés sur les référentiels respectifs suivants :

  • UL 1370 « Factory built unvented liquid or gelled alcohol based fuel burning decorative heating system » avril 2006
  • ULC/ORD-C627 « Unvented Ethyl Alcohol fuel burning decorative appliances » avril 2008

Ces certifications des laboratoires UL sont exprimées en termes d’obligation de moyens (épaisseur et qualité des matériaux utilisés, par exemple), ce qui a l’avantage de donner un cadre assez précis aux fabricants ou importateurs.
Les seuls appareils autorisés sont à fixer au sol ou au mur, et dont la puissance et la consommation sont limitées respectivement à 3 kW et à 0,95 litre/heure.
Les limitations de puissance et de consommation, associées à des obligations de moyens lors de la conception assurent la mise sur le marché d’appareils apportant toute la sécurité nécessaire selon les recommandations d’utilisation des fabricants.

Cas de l’Allemagne

Les autorités allemandes ont une approche assez pragmatique des appareils à l’éthanol, ces appareils ne pouvant pas par définition être catalogués comme appareils de chauffage. Cette approche est renforcée par le coût supérieur au kWh que peut représenter un appareil fonctionnant à l’éthanol.
Le risque d’intoxication au monoxyde de carbone ne devrait pas être un risque majeur, l’éthanol ayant la particularité d’avoir une combustion quasi complète, donc générant peu de ce gaz toxique et inodore. Dans un cadre rationnel d’utilisation et en suivant les recommandations précises des fabricants, l’intoxication au monoxyde de carbone n’est donc pas considérée comme un risque majeur pour les autorités allemandes. Il n’y a d’ailleurs à ce jour pas d’accident d’intoxication répertorié.
Le risque majeur identifié par les organismes de certification est lié à la quantité d’alcool utilisée lors de la combustion : ainsi, le TÜV SÜD, organisme de certification, recommande de ne jamais laisser de l’alcool dans un brûleur en éteignant sa flamme, parce qu’il y a toujours dégagement de vapeurs d’alcool dans un brûleur chaud et ces vapeurs peuvent potentiellement s’enflammer et parce que l’alcool peut alors rester accessible à des jeunes enfants susceptibles de l’ingérer ou de vouloir allumer l’appareil en absence d’adultes.

Cas de la Suède

Les autorités suédoises ont une approche plus globale de la sécurité des appareils et le SITAC préfère faire réaliser les installations des appareils par des professionnels. Ainsi, l’installation d’un foyer fonctionnant à l’éthanol doit être approuvée par un installateur agréé de cheminée ou par tout autre organisme expert.
L’intervention d’un expert permet d’apporter les recommandations d’utilisation aux consommateurs et de répondre à toutes les questions qui peuvent se poser.

3. Les dangers

Existe-t-il de réels dangers à posséder une cheminée au bioéthanol ?

Les dangers associés à la cheminée à l’éthanol sont dus à l’utilisation d’une flamme libre. Il est donc recommandé de faire preuve de bon sens quant à l’utilisation de ces appareils, qui ne doivent pas être utilisés comme des appareils de chauffage.
L’utilisation comme instrument de chauffage est de toutes les façons limitée par le coût au kWh (voir dossier de la CSC qui donne un coût de l’ordre de 3 fois plus cher que les autres modes de chauffage).

Danger d’intoxication

La combustion de l’éthanol ne produit que de la vapeur d’eau et du dioxyde de carbone. Cependant, la combustion est moins complète au début de la combustion, à la fin de la combustion et par des effets de bord ou de confinement. Cette dégénérescence de la combustion entraîne la génération de monoxyde de carbone, comme dans toute combustion.
Toute combustion produit donc plus ou moins du monoxyde de carbone. Cependant, l’éthanol a une bonne qualité de combustion (voir résultats édités par le TÜV) et la production de monoxyde de carbone est suffisamment faible pour ne pas aboutir à des niveaux de concentration dangereux ou même perturbants. La quantité de monoxyde de carbone générée dépend de la configuration du brûleur, de la qualité de l’air utilisée, de la présence de parois froides à proximité de la flamme, d’une utilisation en continu, etc. Des essais réalisés par le LNE dans le cadre des réunions de normalisation ont démontré que les concentrations de monoxyde de carbone pouvaient rester en dessous des valeurs préconisées par l’OMS.
Cette qualité de combustion explique que ces appareils soient acceptés par les autorités allemandes ou américaines qui ne sont pas connues pour être les plus laxistes, sans obligation de contrôle de la concentration de monoxyde de carbone.
Comme il n’y a pas de corrélation entre les quantités de monoxyde de carbone et de dioxyde de carbone générées lors de la combustion, vouloir traiter le danger lié au monoxyde de carbone en mesurant la quantité de dioxyde de carbone avec un détecteur ne répond pas vraiment à la question posée. La densité des 2 gaz n’étant de plus pas la même, les mesures de concentration ne peuvent décidemment pas s’extrapoler de l’un à l’autre.
De plus, si on veut quand même pister le CO en fonction du CO2, la quantité de dioxyde de carbone est facilement calculable avec la quantité d’éthanol utilisée. Donc, de simples abaques avec une information sur les conditions d’utilisation peuvent permettre à tout un chacun d’utiliser ces appareils en toute tranquillité et sans risque d’intoxication.

Danger d’incendie

Une flamme a évidemment la capacité de mettre le feu et il faut donc disposer l’appareil à distance des voilages, par exemple. Le plus simple est donc de mettre en œuvre des distances de sécurité, des pare-feu ou des protections à la flamme.

Danger de brûlures

Toute flamme dégage de la chaleur et il peut y avoir des parties chaudes sur les appareils. Même si la flamme à l’éthanol n’est pas forcément une flamme très chaude (autour de 400° C), il peut y avoir des parties chaudes à proximité immédiate du brûleur où il est possible de se brûler.
Les mesures à prendre peuvent être les mêmes que pour le point précédent.

Effet flash

Ce phénomène se produit lors de la concentration des vapeurs de gaz, particulièrement en cas de réallumage. La réponse doit être apportée par une configuration de brûleur limitant l’effet concentrationnaire ou en préconisant l’allumage seulement quand l’appareil est froid.

Effet de débordement

Le phénomène de débordement est lié au trop plein pouvant survenir lors du remplissage du brûleur dans son logement et à l’allumage sans traiter le produit répandu hors du logement prévu.

Remarque sur la norme française

Il est à noter que le projet de norme française ne répond directement à aucun des dangers identifiés dans le dossier de la CSC :

  • Pas de pare-feu
  • Pas de traitement du débordement
  • Imposition d’un détecteur de CO2 (dioxyde de carbone et non pour le monoxyde de carbone)
  • Pas de cuve de rétention
  • Pas de type de matériau préconisé (épaisseur, configuration, caractéristiques, etc.)

4. Bien choisir sa cheminée

Quels conseils donneriez-vous à des personnes qui souhaitent acheter une de ces cheminées ?

Aujourd’hui, ce marché est encore neuf et donc tous les modes de distribution n’ont pas encore une formation suffisante pour apporter les conseils nécessaires pour permettre une bonne appropriation des produits.

Il est préférable d’aller chez des revendeurs spécialisés. Il doit en exister encore, malgré cette campagne de publicité négative qui a figé le marché, créé un phénomène de peur sans commune mesure avec les risques réels de ces appareils et écroulé les ventes.

Le SAFALC a pour volonté de mettre en place un processus d’agrément, que ce soit pour les revendeurs, pour les fabricants ou pour les combustibles afin de sécuriser les consommateurs.

Quel est le budget moyen pour une cheminée au bio éthanol de qualité et sécurisée ?

Tout dépend de la catégorie de modèles, il faut compter entre 1500 et 3000 € en fonction de la taille et de la capacité des appareils. Evidemment, les prix peuvent aller beaucoup plus haut pour des modèles haut de gamme, qui sont tout autant sécurisés.
Tout est une question de goût et de choix sur les matériaux, sur les coloris et sur les degrés de finition attendus.

Un petit mot pour conclure ?

L’éthanol n’est pas dangereux en soi, et la validation de la norme permettra évidemment de démontrer que l’utilisation de ces appareils ne présente pas de risque dans un cadre d’utilisation rationnelle.

Le redémarrage de ce marché démontrera donc que cette campagne de diabolisation n’était pas entièrement fondée et qu’elle n’a eu pour effet que de déstabiliser les acteurs en place.

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